Ce temps de confinement (en Grèce!) m’offre le temps et l’inspiration d’une activité inattendue, une première pour moi: réaliser une interview ! Myriam et Jacky Boisset m’ont en effet fait l’honneur de répondre à mes questions. Sportifs de haut niveau, ils ont adopté l’alimentation vivante pour performer sans abîmer leur corps et… ça a changé leur vie entière. Crudivores, permaculteurs, passionnés de santé au naturel et joyeux, voici un couple hautement inspirant.
Résumé de l’interview
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- Comment avez-vous rencontré puis adopté l’alimentation vivante?
- A-t-il été difficile de déconstruire le modèle des recommandations officielles sur l’alimentation du sportif?
- A quoi ressemble votre journée-type (nourriture, activité physique)?
- Que pensez-vous de l’idée que les fruits apportent trop de sucres, sont durs à digérer?
- Quid du mythe des protéines et de la masse musculaire?
- En cette période d’épidémie, quelles pratiques de santé recommandez-vous?
- Parlez-nous de la jungle fruitière et du Raw Center que vous avez construit dans un terrain désertique aux Canaries!
- Comment enclencher le cercle vertueux dont vous êtes l’exemple?
- Vous consommez de l’eau de mer: pourquoi, comment?
- Où peut-on vous retrouver et en savoir plus?
Comment avez-vous rencontré puis adopté l’alimentation vivante?
« Après avoir pratiqué le sport de haut niveau pendant 15 ans, notre corps commençait à devenir moins performant et à s’user. Comme on ne voulait pas prendre des compléments alimentaires pour continuer à vivre de notre métier-passion, on a cherché d’autres moyens. Et très vite, on a découvert l’alimentation vivante. On a alors fait nos recherches car nous avons une formation scientifique, et on a commencé à expérimenter.
Quant à la transition, elle s’est fait en plusieurs temps. Pendant 2 ans, nous avons vécu dans un van en Australie, où il n’y avait pas de frigo. On a donc dû éliminer la viande, les produits animaux et modifier notre alimentation naturellement. Mais c’est véritablement lorsqu’on a été complètement convaincu qu’on était fait pour manger vivant, et en particulier des fruits, qu’on a adopté cette alimentation à 100% d’un coup! Ça peut paraître extrême mais c’est aussi parce qu’on est des compétiteurs!
Aujourd’hui on recommanderait aux gens de faire la transition plus tranquillement… »
A-t-il été difficile de déconstruire le modèle des recommandations officielles sur l’alimentation du sportif?
« Nous avions au départ toutes les croyances qu’ont les gens actuellement, et il y avait peu d’études sérieuses au sujet de cette alimentation vivante appliquée à des sportifs. On se demandait si on aurait notre dose de protéines, assez d’énergie… On était prêt à changer pour améliorer nos performances, mais il nous fallait des preuves pour arriver à déconstruire tout ce qu’on avait appris dans notre formation! (NB: Mimi a fait de la recherche en physiologie du sport et a un BTS Diététique.)
En France, il n’y avait personne à l’époque, mais on a trouvé un canadien et un américain qui traitaient du sujet. Ensuite, à force de chercher, on a trouvé de nombreuses personnes pour nous expliquer.
On a alors commencé à expérimenter. On n’avait pas vraiment le droit à l’erreur car on enchaîne les compétitions de façon très intense. Mais dès qu’on a commencé à passer aux jus* et aux fruits (* NB: jus de légumes réalisés à l’extracteur à jus), on a vu nos capacités de récupération s’améliorer drastiquement. Lorsqu’on a eu chacun, à 2 ans d’intervalle, une entorse, on a ressenti dans notre corps la réparation s’opérer la nuit. C’était incroyable!
On a fait un bilan sanguin au départ pour nous rassurer, puis on n’en a plus ressenti le besoin car notre corps parlait pour nous. Nos coéquipiers ne mangeaient pas comme nous et ne validaient pas cette alimentation, mais les résultats étaient là. »
A quoi ressemble votre journée-type (nourriture, activité physique)?
« On va vous décrire notre façon de manger aujourd’hui, mais il faut savoir qu’on a eu des phases d’évolution où on mangeait plus, et que ça peut varier aussi d’un jour à l’autre, selon les besoins de notre corps. On se laisse guider par lui.
- matin: pas de petit-déjeuner. Entraînement sportif (endurance).
- midi (12 ou 13h): 1ère prise alimentaire. D’abord un verre détox contenant 1/4 de jus de citron, 1/4 d’eau de mer et le reste d’eau. Puis les fruits dont on a envie en quantité (1,5-2 kg en moyenne par repas) en évitant les mélanges (fruits acides espacés des fruits type bananes, principe de la mono-diète). Ce midi, on a pris 3 grands verres de jus d’orange (à l’extracteur, ce qui représente beaucoup d’oranges) et 2 tomates. NB: habituellement, Mimi et Jacky les mangent à la croque, mais en ce moment ils testent la forme « jus ».
- après-midi: entraînement sportif (force). Si envie, encas de fruits (3-4 bananes par ex)
- soir: repas de fruits ou de légumes* précédé ou non d’un grand verre de jus de légumes. Ce soir, c’était 1/2 papaye chacun et un grand verre de jus de grenades à l’extracteur.
* Mimi et Jacky ne mettent pas de sauce dans la salade de légumes, mais beaucoup d’aromates (basilic, céleri, persil…). Les sources de gras sont les végétaux entiers type avocats, olives…
Cette façon de manger des fruits quasiment sous la forme de mono-diètes nous a permis d’améliorer nos performances. On a vraiment vu la différence sur la digestion notamment.
Notre alimentation globale comprend en plus des fruits (majoritaires) et des légumes: des algues, de la spiruline, occasionnellement des graines germées (lentilles, sarrasin) et des fruits séchés. Nous ne consommons par contre pas d’oléagineux, même trempés. »
Que pensez-vous de l’idée que les fruits apportent trop de sucres, sont durs à digérer?
« Les fruits se digèrent en 15-30 min (pastèques, melons…) et jusqu’à 2-3h pour les plus longs (bananes, avocats…). Mais le fait d’avoir mis du gras dans un repas (huile d’olive, sauce, fromage…) fait passer ce temps de digestion à 8-12h. Si on termine un tel repas par un fruit, ce dernier va attendre, fermenter et on a un renvoi, un rot, de ce fruit en attente. C’est ainsi que les gens concluent qu’ils ne digèrent pas les fruits. Dans ces conditions, moi non plus, je ne le pourrai pas!
Quant aux sucres, il est certain qu’on rejoint la recommandation de les manger entiers avec leurs fibres, en mastiquant bien, pour une assimilation lente, évitant ainsi un pic de glycémie. On réhydrate par exemple toujours les fruits séchés, trop concentrés en sucres sinon. Mais on observe toutefois que ce pic de glycémie ne se produit pas si on a un sang propre et un fonctionnement optimal.
D’ailleurs, je regardais récemment la table des index glycémiques: les fruits ont des index beaucoup plus bas que des aliments comme les pâtes, le pain… Les gens confondent la teneur en sucres avec le goût sucré, voire avec le simple sucre raffiné. »
Quid du mythe des protéines et de la masse musculaire?
« On n’est pas stressé par l’apport en protéines car c’est une fausse-croyance que les fruits n’apportent pas ce qu’il faut*. Quand on nous pose la question, on donne l’exemple des bébés: au moment où ils grandissent le plus, leur apport en protéines est seulement de 6% dans le lait maternel! Tout le monde en veut beaucoup plus, alors qu’au-delà c’est délétère (pour les reins et autres)…
Beaucoup de personnes s’inquiètent de « fondre en volume » et de « perdre de la masse musculaire » en passant à cette alimentation. C’est parce qu’en désacidifiant leur corps, ils perdent de l’inflammation, et la rétention d’eau associée (apparue pour contrer cette acidité). Cela révèle alors une faible musculature, mais il n’y a pas de fonte musculaire. On sait – car on est spécialisés dans le jeûne aussi – que le muscle est la dernière chose que le corps va mobiliser (trop énergivore). »
* Notes personnelles: trop de personnes confondent protéines et muscles. Ce sont en réalité les acides aminés, unités de base des protéines, qui permettent de construire les muscles. Or, on les trouve en quantité dans l’alimentation vivante. Pas besoin dans ce cas de « casser » des protéines par la digestion, pour obtenir ces acides aminés et pouvoir les utiliser: ils sont bio-disponibles tout de suite. »
En cette période d’épidémie, quelles pratiques de santé recommandez-vous?
« Personnellement nous n’avons rien changé!
Mais nous pouvons recommander les 5 pratiques suivantes en plus d’une alimentation vivante (jus, eau de mer, fruits…):
- prendre 10 bonnes respirations conscientes, fenêtre ouverte, chaque jour
- tester la douche froide (commencer par du chaud puis passer quelques secondes au froid, et progresser chaque jour)
- positiver, rigoler, être dans la joie 30 min par jour (couper les sources anxiogènes le plus possible)
- faire quelques exercices physiques 30 min par jour (pour faire circuler la lymphe)
- pratiquer le bain dérivatif (pour ceux qui ont du mal avec la douche froide ou le sport, ajout personnel)
Toutes ces pratiques permettent de renforcer le système immunitaire. »
Parlez-nous de la jungle fruitière et du Raw Center que vous avez construit dans un terrain désertique aux Canaries!
« Quand on a changé d’alimentation, tout a changé dans notre tête. Comme on mangeait beaucoup de fruits, ça nous a semblé plus cohérent de vivre dans un lieu où pleuvent les fruits. La vie nous a amené sur les îles Canaries. Il n’y avait rien, nos parents nous ont pris encore une fois pour des hurluberlus, mais nous, on savait qu’on allait le transformer.
On s’est alors formé à la permaculture pour régénérer le lieu. Nous nous sommes passionnés autant pour la santé de l’Homme, que pour la santé de la Nature, car c’est la même chose. Ici, dans cet endroit, on a remis l’humain à sa place. On fait les choses pour la nature, et l’humain y prend sa place. Mais ce n’est pas l’Homme qui passe en premier.
Nous avons créé ce centre pour que les gens viennent expérimenter ce mode de vie, casser leurs barrières et voir que c’est possible sans devenir des ermites en marge de la société. Nous semons et plantons dans ce lieu toute sorte de végétaux ramenés de nos voyages, afin de constituer une banque de graines. »
Comment enclencher le cercle vertueux dont vous êtes l’exemple?
« Nous recommandons de suivre son cœur et de passer à l’action malgré les jugements et les peurs. Ne pas forcément viser un trop gros changement par rapport à son point de départ. On aime bien l’accord toltèque :
« Fais de ton mieux à l’instant présent. »
Dans notre centre, on montre aux gens toutes les portes d’entrée, toute la palette de ce qu’il est possible de faire: respiration, alimentation, pensée positive, sport, reconnexion à la terre… pas dans le but que les participants fassent un énorme changement qui ferait peur, mais au contraire qu’ils fassent un petit changement dans le domaine qui les attire le plus, et selon leurs possibilités.
Certains vont commencer à faire leur compost ou faire pousser des tomates-cerises en appartement pour se reconnecter à la nature. D’autres vont être attirés par la respiration, ou par l’alimentation vivante. D’autres par l’activité physique.
Nous insistons beaucoup sur le jeu*, pour sortir de la vision qu’il s’agit d’une contrainte, d’un effort, de changer une habitude. Avec le jeu tout devient plaisant, facile, et on se félicite alors d’avoir réussi à faire ses courses avec tous ses sacs en tissu, sans plastique! Sans cette vision positive, légère, on ne tient pas sur le long terme. C’est d’ailleurs ce que nous avons fait dans notre métier, pour les entraînements, sans quoi nous aurions abandonné depuis longtemps. »
* Note personnelle: la société a beaucoup diabolisé le jeu et la légèreté alors qu’il s’agit de la voie royale pour tous les apprentissages et le passage à l’action.
Vous consommez de l’eau de mer: pourquoi, comment?
Eau de mer vs sel marin
« L’eau de mer contient des minéraux bio-assimilables, contrairement au sel séché, déshydraté. En effet, dans la mer, ces minéraux sont chargés électriquement car ils ont été transformés par une source végétale qu’est la plancton. Le sel sec pourrait retrouver cette forme bio-assimilable, mais cela nécessiterait des opérations importantes. »
Intérêt santé
« L’intérêt de l’eau de mer pour la santé est qu’elle contient une proportion de minéraux strictement identique à celle de notre liquide interstitiel (milieu intérieur) dans lequel baignent nos cellules. Il s’agit strictement de la même composition, ramenée à l’isotonie. La seule différence est en effet que l’eau de mer est beaucoup plus concentrée: on préconise donc de mettre 0.5L d’eau de mer avec 1.5L d’eau normale pour arriver à 2L d’eau de mer isotonique.
C’est aussi dans ce milieu (eau de mer isotonique) que survivent le plus longtemps des cellules en culture, comparé à toute sorte d’autres liquides (dont le sérum physiologique qui est du sel inorganique et de l’eau). »(Découverte de René Quinton, note personnelle)
Filtration et accès à l’eau de mer
« Nous sommes allés dernièrement au Nicaragua pour nous former à cette technique de santé. Il existe là-bas un dispensaire qui distribue gratuitement à toute la population (grâce à des subventions de l’état) près de 6000L d’eau de mer par mois! Ils s’en servent pour soigner toutes sortes de pathologies, à raison de 500 ml par jour (soit 2 L d’eau de mer isotonique). Et ils ne la filtrent pas! La concentration de sel est en effet telle qu’elle neutralise tous les pathogènes. Et la mer a un pouvoir auto-régénérant exceptionnel si on lui laisse le temps et l’espace nécessaires pour le faire.
Depuis ce voyage, nous ne filtrons plus l’eau de mer avec notre potabilisateur Berkey (article sur cet appareil ici)! Il faut simplement être vigilant au lieu de prélèvement de cette eau de mer, c’est-à-dire, ne pas être trop près d’un port ou d’un point de rejet.
Notre projet est de créer de tels dispensaires partout dans le monde pour faciliter l’accès pour tous à l’eau de mer. De nombreux sites en proposent déjà: à des prix élevés comme Quinton, ou des prix nettement plus modestes (2-3 euros le litre).
L’eau de mer, c’est la technique de santé de l’avenir, et ça limitera peut-être que la montée du niveau des océans ! »
Où peut-on vous retrouver et en savoir plus?
Toutes les infos (dates des stages, de leurs compétition etc) sont à retrouver sur leur site: https://myriametjacky.com/
Leur chaîne Youtube est intitulée Raw Adventure – Vivre au naturel.
Les photos proviennent de leur site internet et du site de l’instant cru, c’est en effet grâce à Marie-Sophie L – raw chef dont j’ai suivi la formation! – que j’ai appris à les connaître.